Titre : Contre-enquête sur la mort d'Emma Bovary Auteur : Philippe Doumenc Genre : policier Langue d'origine : français Critique : VO Date de publication : 2007 Prix : 6,60€ Résumé : Elle s’appelle Emma Bovary et son histoire est célèbre. Amoureuse de l’amour, elle a vécu d’illusions, trompé son mari et ruiné son ménage. Dans un geste de désespoir, elle se tue en absorbant une forte dose d’arsenic – c’est du moins ce que prétend Flaubert. Or c’est un fait reconnu que l’arsenic, en une seule prise, n’est presque jamais mortel… Voici ce qui s’est réellement passé : au chevet de la jeune femme, deux médecins ont été appelés. L’un relève des traces discrètes de contusions ; l’autre pourra témoigner des derniers mots chuchotés par Emma : “Assassinée, pas suicidée.” Deux policiers de Rouen sont dépêchés àYonville afin d’élucider l’affaire. Et voilà bientôt plusieurs suspects : un mari cocu, un prêteur sur gages, deux femmes de caractère, un cynique libertin, un pharmacien concupiscent… Dans le décor médiocre et petit-bourgeois où Emma suffoquait d’ennui, Philippe Doumenc orchestre une contre-enquête brillante et talentueuse qui nous révèle enfin ce que Flaubert lui-même feignait d’ignorer. |
Alors, c'est un livre que je devais lire pour le lycée dont je vais vous parler aujourd'hui, mais rassurez-vous, ce n'est pas un classique. C'est pourquoi je ne l'ai pas différencié de mes lectures habituelles et que je vais donner une note à la fin de ma critique. Bref, c'est déjà un livre particulier en soi puisque l'auteur, contemporain, écrit donc sur une contre-enquête concernant la mort d'Emma Bovary. Qui n'a pas lu Madame Bovary, que je lui tape sur les doigts ? Madame Bovary, c'est mon programme de littérature pour le bac de cette année et ça me panique un peu mais c'était déjà un roman que j'ai étudié un peu l'an passé (et donc lu si vous suivez bien). Oui, les choses sont bien faites et non, je ne m'étendrai pas sur le pourquoi du comment je n'y arrive pas du tout en littérature (coucou le programme impossible). En tout cas, Madame Bovary, plus qu'un simple classique à étudier, c'est un coup de coeur, parce que c'est merveilleusement écrit de la sublime plume de Flaubert, que c'est une critique juste de la société d'alors (le 19 ème siècle) et que les personnages dont Emma, principalement, sont assez inoubliables. En tout cas, je n'ai pas du tout été insensible à l'histoire de cette jeune femme. Vais-je vous raconter la fin ? Je crois que j'y suis bien obligée (si vous ne l'avez pas lu et que vous n'en savez rien, il est encore temps de passer son chemin) pour en venir ensuite à ce qui m'amène à faire cette critique. Emma Bovary a été mariée (elle l'a plus ou moins choisi, comme toutes les femmes de l'époque) à Charles Bovary, un médecin de campagne (pour schématiser) un peu minable. Elle qui rêvait de grands amours comme dans les romans romantiques qu'elle lisait, la voilà bien vite désabusée. Elle s'ennuie et naturellement a donc deux amants au cours de sa vie (je ne vais pas rentrer dans les détails). Et puis elle s'est endettée et finalement, décide de se suicider afin de régler le problème (ah, l'argent) avec de l'arsenic (mort-aux-rats).
Que vient faire donc Contre-enquête sur la mort d'Emma Bovary dans l'histoire ? Eh bien c'est justement une contre-enquête dans laquelle on apprend qu'en fait la jeune femme aurait été assassinée au lieu du suicide décrit par Flaubert. Si vous suivez, il s'agit donc d'un roman policier. Et comment s'y prend l'auteur ? C'est simple, il invente un dénommé Remi accompagnant un policier proche de la retraite, M. Delévoye, chargé de la contre-enquête. Ils arrivent à Yonville (le village où vivait Emma) le jour-même ou le lendemain de sa mort, je ne me souviens plus trop (et pourtant je l'ai dévoré en une journée et je l'ai encore bien en tête). Et ils vont se mettre en quête de preuves réfutant l'hypothèse du suicide et surtout, d'un assassin, passant en revue tous les personnages vivant ou pas dans les parages (tous les personnages mis en scène par Flaubert).
Je suis désolée d'être aussi longue mais le livre le mérite. Pourquoi j'ai été conquise ? Parce que c'est brillant, d'abord. Tout est finement pensé et de ce fait, Flaubert même est intégré dans le roman en tant que personnage à la recherche d'un sujet pour écrire un roman (mais oui, tout s'explique !) On retrouve avec délices tous les personnages auxquels on ne prêtait pas tant attention que ça dans Madame Bovary et qui ont tous quelque chose à cacher. Bien sûr, il n'y a pas de tension particulière comme dans certains livres policiers parce que le meurtrier ne guette pas les policiers. Il s'agit en somme d'une « simple » enquête. Cependant, elle réserve de multiples renversements de situations et on a presque le temps de s'éprendre du héros, Remi. Je ne suis pas tout à fait convaincue de ce côté-là, parce qu'évidemment l'auteur s'est surtout appliqué pour les personnages qui existaient dans Madame Bovary. Et on les découvre sous un nouvel angle, bien plus passionnants que chez Flaubert, finalement. L'auteur parvient à faire de chacun d'entre-eux un personnage haut en couleur et soupçonneux.
Est-ce le style qui m'a séduit dans ce petit roman policier ? Je ne saurai dire avec précision. Il n'est pas extraordinaire, forcément, ce n'est pas écrit de la main du génial et talentueux Flaubert. Pourtant, je l'ai lu d'une traite, incapable de le lâcher parce qu'il y a suffisamment d'indices distillés pour que l'on ai envie de savoir ce qui se passe à la fin. Et puis je ne peux m'empêcher d'admirer le travail de l'auteur qui a été réalisé, sur les personnages, les lieux, les événements de Madame Bovary. C'est intelligent et brillamment pensé, rien n'est laissé de côté et ça tient la route. Et avec quel plaisir on découvre une nouvelle fois Yonville et ses habitants pourtant si ennuyants. L'envie de savoir, sans doute, comme je le disais au-dessus.
C'est un brillant chef d'œuvre que j'ai trouvé là et plus que le côté policier du livre (qui n'est par ailleurs pas tant mis en avant que cela) c'est tous les liens entre les personnages et ce qu'a apporté de nouveau et qui semblait si logique l'auteur, que j'ai véritablement apprécié. Faut-il avoir lu Madame Bovary pour se lancer dans cette lecture ? Pour en profiter comme il se doit et en goûter la saveur indéniable, je répondrai que oui. Ce serait trop dommage de le lire sans comprendre les mille petites nuances et subtilités, les petits détails croustillants qu'ajoute Philippe Doumenc et qui sont comme des petites perles. En bref, un petit livre très agréable à lire et plutôt addictif, qui m'a redonné envie de courir relire Madame Bovary et essayer de déceler des sous-entendus qui résonneraient avec les nouvelles informations fictives apportées par la contre-enquête. Un seul regret, finalement : que le personnage de Remi ne soit pas un peu plus attachant (vous me direz, il ressemble un peu aux habitants de Yonville, finalement. D'une banalité affligeante, en soi.) Bref, si vous avez lu Madame Bovary, je vous recommande fortement d'aller lire Contre-enquête sur la mort d'Emma Bovary et ce, au plus vite !
Note finale 8/10